La session intitulée « portraits d’archivistes » s’est tenue ce mercredi 26 mars 2025 sous la présidence de Marie-Laure Kervegant. Les travaux se sont déclinés en deux parties. La première a mobilisé une réflexion sur les « mutations du travail et société de l’information » sous la forme d’une table ronde entre archivistes et sociologue. Ce dialogue interdisciplinaire a connu l’intervention de Chloé Moser, élève stagiaire à l’Institut national du patrimoine, Anne Lambert, cheffe de la mission archives auprès des ministères sociaux, Mathilde Sergent-Mirebault, doctorante en sociologie à l’université Paris 1-Sorbone. Trois axes se sont dégagés de ces communications : le contexte global des modifications profondes de la production et de la gestion de l’information ; les impacts de ce contexte pour les archivistes – une complexification de la collecte -; enfin les actions des archivistes – une approche pragmatique de la collecte pour penser les choix et répondre aux tensions.
Le métier d’archiviste évolue au gré des transformations profondes du monde du travail et de la société de l’information. À l’ère du numérique et de la flexibilité, les pratiques professionnelles sont remises en question, du fait de la nature des archives comme des conditions de travail des archivistes. La « technicisation » croissante des activités administratives conduit à une « hyper-spécialisation » et une fragmentation des tâches, rendant plus difficile une vision globale des processus. Le numérique promet paradoxalement de tendre vers la rationalisation et l’uniformisation, alors qu’il favorise aussi des usages inédits, parfois détournés des vrais objectifs. Ainsi Mathilde Sergent-Mirebault parle du « numérique en trompe l’œil : entre illusion d’une pleine présence et manque de l’absence ».
L’action des archivistes doit s’adapter au nouvel environnement, à des formes d’archives en constante évolution et construire de nouvelles pratiques. Les archivistes doivent être acteurs de ces mutations, bien que confrontés au dilemme entre la nécessité d’adopter de nouvelles méthodes et la préservation de principes fondamentaux de leur métier, à savoir une approche à long terme et une collecte rationnelle des données. En définitive, cette table ronde entend ouvrir le débat : comment préserver l’équilibre entre adaptation et préservation des valeurs fondamentales du métier d’archiviste ?

La deuxième partie de la session « Portraits d’archiviste » a dépeint différentes facettes du métier d’archiviste à travers trois interventions successives.
D’abord, Aurélie Leroy (Centre hospitalier universitaire de Rennes) et Emilie Fromont (Centre hospitalier de Morlaix) ont interrogé l’archiviste hospitalier : est-il un spécimen unique ou un modèle de déclinaison du métier ? Selon les intervenantes, l’archiviste est un « couteau suisse » dans la mesure où il est à la fois qualiticien, logisticien, juriste, e-archiviste et communicant. En vrai, polyvalent et ancré dans un dans un environnement exigeant, l’archiviste hospitalier jongle entre gestion administrative, accompagnement des services médicaux, préservation de la mémoire hospitalière etc. La crise du COVID est venue mettre en lumière son rôle essentiel, entre réactivité et rigueur, soulignant les particularités de ses fonctions par rapport aux autres postes d’archivistes.
Ensuite, Stéphanie Roussel (archiviste consultante représentante de Mintika) a proposé des pistes de réflexion sur l’archiviste numérique nommé « e-archiviste ». Evoquant la transition numérique du métier d’archiviste, l’intervenante explique que longtemps perçu comme un expert isolé, le rôle de l’archiviste numérique tend à se généraliser, témoignant d’une transformation de l’organisation des services d’archives. L’archivage numérique ne saurait être réduit à un domaine réservé : il entraine des changements des organigrammes et des services, modifie les méthodes de travail, les compétences requises et l’équilibre entre papier et numérique. Une telle réflexion identitaire concerne l’ensemble de la profession.
Enfin, Leonor Calvao Borges et Ana Largarida Silva, archivistes à l’Université de Coimbra se sont penchés sur « l’autoreprésentation des archivistes portugais ». A travers un regard croisé entre stéréotypes littéraires et perceptions des professionnels eux-mêmes, cette communication en forme d’enquête fait comprendre comment les archivistes portugais se définissent et la reconnaissance qu’ils estiment recevoir.

Billet rédigé par Grâce Manima Nkounkou et Blandine Sabi Senon