La session « Le jardin secret des archivistes », présidée par William Jouve de la ville de Bayonne, a débuté à 10h40 dans le Carré 1, avec les interventions de Jean-Paul Dibouès de l’INA, Céline Guyon de l’Enssib et Isabelle Homer du ministère des Armées.
L’intervention d’Isabelle Homer, « Une aventure coréenne », portait sur un projet en partenariat avec la Corée du Sud. Fin 2018, la présence de chercheurs coréens et français étudiant des archives dans la salle de lecture des Archives départementales de la Marne interroge le service. En effet, dans le cadre du centenaire du Mouvement d’indépendance coréen, la Corée du Sud entreprend des recherches au sujet des exilés coréens en Europe et particulièrement en France. En 2020, elle a parcouru les Archives nationales et les sites internet des Archives départementales afin de retrouver des traces de la présence coréenne en France. Cette aventure lui a permis de retrouver des descendants d’exilés coréens et de pérenniser le partenariat franco-coréen en réalisant des documentaires. Le bilan de cette expérience est positif tant d’un point de vue scientifique et archivistique qu’humain. Cela a également permis de valoriser les archives françaises auprès du public coréen.
Nous avons enchaîné avec l’intervention de Jean-Paul Dibouès qui après une petite anecdote proustienne, nous a rappelé l’histoire de l’informatisation des archives de l’INA et son rôle dans celle-ci. Au tournant des années 2000, l’INA débute une numérisation massive qui conduit à l’enrichissement de la base de données par des notices, des fichiers et l’indexation. Cette numérisation permet de répondre plus facilement aux demandes des « clients » et de faire des recherches plus larges et plus détaillées. C’est quand son rôle de documentaliste a remplacé celui d’archiviste qu’il a commencé à « flâner » dans cette base de données, afin de prendre son temps face à la rapidité de la société et de s’évader du quotidien. Volontairement ou par hasard, sa curiosité lui permet d’enrichir sa connaissance des fonds tout en s’émouvant de la simplicité du quotidien et du côté humain présent dans les archives.
Enfin, Céline Guyon nous a présenté ses réflexions sur le (dé)goût des archivistes pour les archives numériques, dans la double filiation du Goût de l’archive d’Arlette Farge et du Goût de l’archive à l’ère numérique de Caroline Muller et Frédéric Clavert. Selon elle, les questions que les archivistes d’aujourd’hui se posent au sujet des archives numériques (support, conservation, intérêt, évolution…), ceux des décennies précédentes y avaient déjà pensé. Si entre les années 1960 et 1970, les archivistes débattent sur l’intérêt de la conservation des « nouvelles archives », le déploiement de l’usage informatique dans l’administration dans les années 1980 met l’archive informatique au centre des préoccupations. En 2001, l’écrit informatique obtient une reconnaissance de sa valeur juridique. Pourtant, la collecte des archives numériques reste inégale dans les services.
Pour nous sensibiliser au soin à apporter aux archives numériques, Céline Guyon nous rappelle leur fragilité. Enfin, outre la question des supports et de la conservation, certaines archives subissent des suppressions ou des effacements volontaires. L’archiviste est tout autant responsable de la sauvegarde de ces archives que des archives physiques. Pour cela, elle propose de décentrer nos regards de l’émotion liée à la « pépite » et à l’affect des archives papier en reconnaissant la fragilité des archives numériques.
La session s’est conclue sur un rapide échange entre les intervenants sur deux points : la question de la transmission : des archives au public en présentiel ou via une base de données diffusée en ligne, de l’histoire de nos pratiques et de nos questionnements archivistiques ; celle de l’intérêt « d’aller voir ailleurs » en découvrant une nouvelle culture, de nouveaux espaces et une autre temporalité.
Billet rédigé par Amandine Le Gal et Léa Marcandella.